Horaires de travail et santé
En France, seulement 37 % des travailleurs ont des horaires de travail « normaux » (35h du lundi au vendredi avec deux jours de repos hebdomadaire). Ce sont ceux qui respectent le mieux notre biorythme. Les autres horaires, travail posté, de nuit, horaires et jours variables, heures supplémentaires, etc., sont atypiques et peuvent perturber notre horloge biologique. L’alimentation et la vie en société sont modifiées, ce qui peut provoquer des troubles fonctionnels dus à la désynchronisation de nos rythmes biologiques et aboutir à des insomnies, des troubles de l’humeur, voire la dépression.
AVENIR SANTÉ MUTUELLE tente d’en savoir plus sur les symptômes et les conséquences d’horaires atypiques et sur les moyens d’en limiter les nuisances sur la santé.
Une horloge interne de 24h
Depuis que l’Homme existe, et comme beaucoup d’êtres vivants du monde végétal ou animal, notre activité biologique est réglée selon une horloge interne dont le cycle est calé sur le temps de rotation de la terre autour du soleil, c’est à dire 24h. Notre alimentation, notre sommeil, et plus généralement nos processus physiologiques sont synchrones avec cette régularité solaire. C’est le cycle circadien, cette régularité qui nous donne envie de dormir la nuit et qui nous maintien éveillé le jour. Mais justement, ce cycle biologique est très sensible aux événements externes qui pourraient simuler un dysfonctionnement de ce cycle solaire. Le manque de lumière, dans la journée, ou, au contraire une luminosité en dehors des heures nocturnes.
Les horaires de travail dits « normaux » répondent le mieux à ce besoin de régularité. Par horaires « normaux », il faut comprendre la semaine de 5 jours, avec des horaires réguliers, situés généralement dans une fourchette de temps entre 8h et 20h avec deux jours de repos hebdomadaires. Tout aménagement des horaires de travail situé en dehors de ce cadre « standard » est considéré comme « atypique ».
L’impact négatif des horaires atypiques
Les horaires atypiques ne s’entendent pas seulement dans le cadre professionnel. Les modes de vie peuvent également exercer une influence sur notre cycle circadien, en voyage par exemple, avec des habitudes de vie différentes, à l’occasion de sorties nocturnes répétées, etc. Mais c’est bien le métier que l’on exerce et ses contraintes horaires qui vont avoir le plus fort impact sur notre horloge biologique. Rester éveillé la nuit, dormir le jour, manger à des horaires irréguliers, des repas pas toujours équilibrés et « sur le pouce », avoir un rythme de travail qui modifie constamment les périodes de sommeil, peuvent avoir des répercussions physiques et accroître le risque de problèmes de santé, y compris de cancer.
La modification de notre rythme biologique peut perturber la production des substances chimiques essentielles au fonctionnement de notre corps. Le manque de lumière, dans le cas d’un travail de nuit, peut diminuer la quantité de vitamine D ou de mélatonine (qui contribue à ralentir le développement des tumeurs) ou bien encore influencer la production de certaines hormones comme les œstrogènes.
De ce fait, les risques d’addiction sont plus fort, le tabac, l’alcool, le grignotage, le manque d’exercice qui peuvent donner l’illusion de compenser un manque biologique, vont aggraver les risques de maladie.
De nombreuses études ont démontré les effets négatifs sur la santé d’horaires atypiques de travail. Chez les chauffeurs de bus, il a été constaté que le taux d’homocystéine plasmatique, qui reflète la consommation de légumes, était moins important chez ceux qui travaillent la nuit. Chez les personnes qui travaillent en 3X8, le taux d’HDL (bon cholestérol) est plus bas que la moyenne et les triglycérides sont en augmentation.
Le travail de nuit augmente la glycémie et diminue l’insulinosécrétion. Le manque de sommeil fait baisser la tolérance glucidique, augmente le cortisol en fin de journée. La consommation de gras et de sucres est plus importante en raison de modifications hormonales et, de ce fait, le risque de diabète et d’hypertension artérielle est accru. Aux environs de 2h ou 3h du matin, l’envie de dormir se fait sentir et provoque un état de somnolence qui réduit la concentration et l’attention aux évènements externes. Le risque d’erreur humaine augmente, notamment sur la route, au moment de se rendre à son travail ou lors du retour au domicile.
La fatigue engendrée par le manque de sommeil diminue l’envie de pratiquer une activité physique. La privation de sommeil peut donc être facteur d’obésité, même si aucun lien scientifique n’a pu être démontré à ce jour.
Le travail de nuit peut générer un sentiment d’insécurité dans les transports en commun ou dans les lieux où les produits ou les équipements stockés peuvent inciter au vandalisme ou au cambriolage.
Les troubles liés aux horaires atypiques entraînent des conséquences cognitives qui peuvent aller jusqu’à la dépression ou au burn-out, en passant par des phases d’anxiété, d’irritabilité ou des troubles de la personnalité.
Bien entendu, l’activité sociale et familiale est perturbée. Il est plus difficile d’organiser des rencontres amicales, de participer ou de s’engager dans des activités sociales, culturelles, sportives ou associatives. Le temps de partage avec les enfants ou le conjoint est limité.
Limiter les effets d’un dérèglement du cycle biologique
Plusieurs facteurs doivent être régulés pour retrouver un cycle circadien qui s’adapte le mieux à son rythme de vie et qui compense les dérèglements biologiques liés à la lumière, à la température et à l’alimentation. Dès l’apparition de raideurs dans la nuque, de picotement dans les yeux ou de bâillements répétés, il faudra, pour garder le contrôle, mettre en œuvre de petites astuces pour retrouver un état de vigilance satisfaisant.
La lumière
Travailler dans un environnement lumineux, compense en partie le manque d’ensoleillement en simulant l’activité solaire. On évitera les ambiances feutrées ou sombre plus propices à l’endormissement, mais on prendra soin de faire une pause de 20mn toutes les 4 heures, comme indiqué dans le code du travail pour prévenir tout risque lié à la somnolence. Quels que soient les horaires, il est conseillé de sortir quelques minutes au grand air et en pleine lumière l’après-midi.
La micro-sieste
Si possible, pratiquer la micro-sieste. Une des méthodes consiste à prendre un jeu de clefs dans la main, à s’assoir confortablement pour se laisser aller jusqu’à la limite de l’endormissement, c’est-à-dire, jusqu’au moment où vous allez lâcher inconsciemment les clefs. Les quelques minutes de repos que votre cerveau aura gagnées vous permettront de repartir avec un capital accru de vigilance.
Le sommeil
Dormir en journée, lorsqu’on travaille de nuit, est moins récupérateur que le sommeil de nuit. Il faudra donc prendre soin d’être régulier dans son processus de coucher pour augmenter la qualité du sommeil. Prendre une douche avant de se coucher permet de faire baisser la température du corps et facilite l’endormissement. 18°C est un bon niveau de température pour la chambre qui rappelle les conditions de la nuit. Au moins une heure avant d’aller au lit, éviter toute activité qui stimule les sens, comme les écrans de télévision, de PC ou de smartphone. On privilégiera une activité reposante comme la lecture ou la prise d’une tisane.
La nuit, les sons sont moins agressifs que le jour, c’est pourquoi pour dormir en journée, des bouchons d’oreilles sont conseillés. Des volets, rideaux occultants ou un masque de sommeil, permettront de recréer l’obscurité de la nuit.
L’alimentation
Lorsqu’on travaille en horaires décalés, il faut être particulièrement attentif à la régularité et à la qualité des repas et adapter son alimentation à ses horaires. A l’issue d’un travail de nuit, par exemple, il conviendra de prendre un vrai repas plutôt qu’un petit déjeuner et on évitera les en-cas trop gras ou trop sucrés. En règle générale, on essaiera de conserver un rythme de 3 repas par jour de manière régulière. Lorsque la régularité est impossible, il faut manger quand la faim se fait sentir.
La vie en société
L’organisation de la vie sociale doit prendre en compte les rythmes de vie que les horaires atypiques imposent. Ainsi, on s’efforcera de participer aux repas en famille, quitte à ne prendre qu’une salade ou un morceau de fromage.
Prendre un peu de temps pour soi, pendant ses temps libres l’après-midi, peut être l’occasion de lire un bon livre ou de rendre visite à un ami. Pourquoi ne pas faire ses courses en ligne plutôt que de courir au supermarché et perdre un temps fou dans les files d’attentes aux caisses ? Préparer les repas pour la semaine, les congeler, pour ne pas avoir à cuisiner chaque jour. Déléguer certaines tâches à son conjoint, aux grands-parents des enfants, etc.
Je suis chef d’entreprise, que puis-je faire ?
Pour limiter les effets négatifs des horaires atypiques des salariés d’une entreprise, le responsable peut prendre quelques mesures favorables pour la santé et le bien-être de ses collaborateurs (Source INRS) :
- Privilégier les salariés volontaires.
- Faciliter l’articulation des temps de travail avec l’exercice des responsabilités familiales et sociales.
- S’assurer que les horaires du poste (début et fin) sont compatibles avec ceux des transports en commun.
- Favoriser la dimension collective du travail.
- Être attentif à rompre l’isolement des salariés concernés et la monotonie des tâches qui leur sont confiées.
- En cas de rotation des postes, prévoir du temps pour les transmissions d’une équipe à l’autre.
- Aménager des systèmes de rotation réguliers et flexibles : permettre aux salariés d’anticiper leur planning, prévoir des marges de manœuvre pour les échanges d’horaires entre salariés.
- Favoriser le maximum de week-end de repos.
- Préférer les rotations rapides qui minimisent le nombre de nuits (2-3 nuits consécutives maximum).
- En cas d’activité non continue le week-end, proposer une équipe de nuit permanente associée à un 2×8 plutôt qu’un 3×8.
- Raccourcir la durée des postes de nuit.
- Repousser le plus possible l’heure de prise de poste du matin (après 6 heures).
- Prévoir un minimum de 11 heures de repos entre deux postes.
- Privilégier les jours de repos après les postes de nuit de préférence.
- Insérer les pauses appropriées pour les repas, le repos et la sieste. Cette dernière doit être courte (moins de 20 minutes).
- Adapter l’environnement lumineux : prévoir une exposition à une lumière d’intensité assez importante avant et/ou en début de poste puis la limiter en fin de poste.
- Rendre possible le retour en horaires classiques.
Conclusion
Les effets négatifs que les horaires atypiques peuvent avoir sur la santé ne sont pas irréversibles. Les problèmes de mémoire, d’attention ou de réactivité qui accélèrent le processus de vieillissement disparaissent au bout d’une période estimée à cinq ans après avoir repris un rythme normal de vie. Pour bien vivre sa période de travail en horaires atypiques, AVENIR SANTÉ MUTUELLE vous recommande d’adopter une hygiène de vie rigoureuse avec un soin tout particulier à votre alimentation, à la qualité de votre sommeil et au maintien d’une activité physique et sociale. Ainsi, l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée sera optimisé, et votre bien-être ainsi que celui de vos proches sera préservé.
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